Demotte, piètre poissonnier
Le Conseil d'État lui donne tort dans une curieuse nomination
Rudy Demotte (PS) vient d'essuyer un échec dont il se serait bien passé, tant il tranche avec son image habituelle. Dans un arrêt du 17 septembre passé inaperçu mais dont la DH a pu prendre connaissance, le Conseil d'État a décidé de suspendre sa nomination d'un haut fonctionnaire, dont la procédure avait fait grand bruit.
L'affaire remonte au mois de mars dernier. En commission, la députée écolo Zoé Genot avait interrogé celui qui était encore, alors, ministre fédéral des Affaires sociales et de la Santé. Cela concernait la nomination d'un nouveau patron à l'Onafts, l'Office national d'allocations familiales pour travailleurs salariés.
Quatre candidats avaient été retenus par le Selor. Deux sortaient du lot : Mme O., jugée "très apte " à la fonction, et M. P., jugé "apte ". Le comité de gestion de l'Onafts s'était ensuite rallié unanimement à ce rapport.
M. Demotte était pourtant passé outre, octroyant la place à M. P., moins bien classé. Mme O. avait donc déposé un recours au Conseil d'État.
Celui-ci vient de rendre une première décision : il suspend la nomination contestée. Il prend argument de différentes failles relevées dans l'arrêté Demotte.
Un : ce texte n'indique pas les raisons pour lesquelles il s'écarte du classement établi par le Selor, appuyé ensuite par l'Onafts.
Deux : la référence faite au rapport sur les candidats est inexacte, et on y passe sous silence "les éléments moins favorables à M. P .".
Trois : le Conseil estime que Mme O. a subi un "préjudice grave " pour cause "d'atteinte à son honneur et à sa réputation ". Il se fonde notamment sur la réponse faite au Parlement par M. Demotte à Zoé Genot. Le ministre y avait déclaré qu'"il y a des gens qui sont de parfaits poissons froids, qui connaissent une matière jusqu'au bout des ongles, mais qui sont incapables de faire du management correct ".
Le Conseil d'État estime évident que c'est bien de Mme O. que Rudy Demotte parlait en ces termes, la frappant publiquement d'"incompétence ", avec "atteinte à sa réputation professionnelle ", et risque d'"un préjudice grave difficilement réparable ".
Il faudra désormais attendre de longs mois avant que tombe l'autre arrêt, qui décidera ou non de confirmer la suspension en procédant à l'annulation de la décision attaquée.
Pour l'heure, Rudy Demotte aura au moins appris que tous les poissons ne se contentent pas de tourner bien sagement dans le bocal dans lequel on a bien voulu les mettre. Et que si une décision ne veut pas être taxée de partisane, elle a intérêt à être dûment motivée par son auteur...
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