Des mois de signatures illégales à Charleroi
Pendant quatre mois, six échevins du collège de Léon Casaert ont signé des décisions sans en avoir le droit. Ces décisions pourraient être déclarées nulles. Désastreux pour la Ville de Charleroi…
L'affaire pourrait avoir des conséquences administratives désastreuses pour la Ville de Charleroi. Selon une note interne dont Le Soir a pu prendre connaissance, il apparaît que pendant quatre mois, entre décembre 2006 et avril 2007, six échevins du collège présidé par Léon Casaert (PS) ont exécuté et validé des actes officiels sans disposer de délégation de signature.
Concrètement, ils ont agi au-delà du pouvoir qui leur était conféré. Non seulement, l'ensemble de leurs décisions pourraient être frappées de nullité en cas de contestation devant une juridiction administrative, mais quand on connaît la lecture judiciaire des dossiers à l'instruction, il est permis de se demander dans quelle mesure certaines délibérations ne sont pas constitutives d'infractions pénales, notamment en représentant des faux dans le chef de leurs auteurs ou de leurs signataires.
Tout vient pourtant d'une volonté de bien faire. En décembre 2006, le bourgmestre PS Léon Casaert, qui prend les commandes de l'exécutif framboise, se fait l'ambassadeur de la nouvelle gouvernance. Il veut tout régler dans le détail : c'est ainsi qu'au lendemain de son installation, le collège communal veille à « prendre acte de la délégation de signature de ses membres ». Il prend acte, mais il n'organise rien. Le point est inscrit au collège suivant, puis encore reporté. Au total, il vient quatre fois en séance, c'est dire l'énergie qu'on consacre à en débattre. Le 9 janvier, le projet est mûr ; des propositions sont émises.
C'est sur ce canevas politique que revient le secrétaire adjoint, Bernard Bermils, dans une note confidentielle datée du 10 avril, trois mois plus tard, où il insiste pour régulariser la situation au plus tôt. S'il émet ses plus vives réserves sur la légalité des actes passés entre le 5 décembre et le 9 janvier, il recommande le recours à un conseil juridique pour sortir le collège de l'impasse. Car le code de la démocratie locale est formel : « Le bourgmestre peut déléguer par écrit la signature de certains documents à un ou plusieurs membres de son collège – la mention de cette délégation devant précéder la signature, le nom et la qualité de l'échevin titulaire. » À Charleroi, Léon Casaert en parle avec ses collègues mais ne le fait pas. Rétroactivement, il lui est impossible de combler le vide administratif.
La note interne où il est rappelé à l'urgence fait état des échevins concernés. À l'époque, Olivier Chastel (MR) est responsable des Affaires économiques. Il doit disposer de la signature pour l'exercice de la tutelle sur la Régie des Marchés mais aussi sur les actes inhérents aux achats et à la passation des marchés de fourniture et services, comme des permis socio-économiques.
En charge des Finances, Jean-Jacques Viseur (CDH) signe pour sa part des ordonnancements, rôles de taxes, visas de factures de fournisseurs ; il établit les extraits des règlements et publications des taxes et redevances. C'est pour la validation d'actes et de documents soumis à la législation sur les marchés publics de travaux ainsi que de voirie que Paul Ficheroulle a besoin d'un mandat, comme Eric Massin (PS) pour le contrôle du recouvrement des recettes et l'engagement des dépenses de la Régie foncière dont il a la tutelle, ainsi que les actes et documents relatifs aux travaux, au logement, à la politique des grandes villes. En l'absence de Massin, Philippe Sonnet (MR), qui est chargé de signer les actes et publications résultant de l'application de la législation sur les établissements insalubres ou dangereux, doit lui aussi disposer d'une délégation. Enfin, Serge Beghin (PS) remplit des fonctions d'officier de l'État civil avec charge particulière de faire observer rigoureusement les actes et la tenue des registres.
La délégation de compétences, c'est-à-dire le transfert de ces fonctions avec les pouvoirs afférents, relève d'une décision du collège dès lors que le bourgmestre accepte cette délégation. L'envoi de la délibération doit être joint au registre de l'État civil, lui-même transmis au greffe du tribunal de première instance. En avril, ce n'était toujours pas fait.
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