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13 juin 2008

Et si on n’indexait plus les gros salaires ?

GUY QUADEN, le gouverneur de la Banque nationale, dresse le bulletin de santé de l’économie belge et lance une piste : « Faut-il indexer de la même manière un salaire de 1.000 euros et un salaire de 10.000 ? »

L’inflation était partout à Bruxelles ce jeudi. Dans les rues et sous la pluie le temps d’une manifestation sur le thème du pouvoir d’achat mais aussi dans les bureaux feutrés de la Banque nationale, où le gouverneur Guy Quaden dressait, comme tous les six mois, le bulletin de santé de l’économie belge.
L’intéressé y est notamment allé d’une « réflexion personnelle » qui ne devrait pas rester sans suites. « Je comprends parfaitement l’indexation des petites pensions, des bas salaires et jusqu’à un certain point des salaires moyens. L’idée première de l’indexation était de préserver la capacité des ménages à acquérir les biens de première nécessité et on doit donc protéger les plus faibles de la hausse du prix des produits énergétiques et alimentaires. Mais tous les revenus doivent-ils automatiquement être augmentés quand l’inflation grimpe ? Doit-on indexer de la même manière un salaire de 1.000 euros et un salaire de 5.000 ou 10.000 euros ? Je pose la question, sans plus. Sur ce terrain, les décisions reviennent aux interlocuteurs sociaux. Ils devront prendre leurs responsabilités, en connaissance de cause, lors du prochain cycle de négociations salariales, dans la seconde partie de l’année. »
Voilà qui ne manquera pas d’alimenter les positions des uns et des autres (syndicats, patronat, politiques) à six mois de la grande négociation bisannuelle qui doit dégager un nouvel accord salarial pour 2009 et 2010.
Guy Quaden ajoute : « Nous avons en Belgique un système de formation des salaires quasi unique qui repose sur deux piliers : l’indexation automatique et la norme salariale (laquelle balise la progression des salaires pour deux ans, elle est actuellement de 5 %, NDLR). Ce système a bien fonctionné jusqu’ici et j’espère qu’il continuera à bien fonctionner, mais cette année est un test. » Un test, 2008 ? Avec l’inflation du moment, « l’indexation des salaires sera plus élevée que ce qui avait été prévu lors des dernières négociations, situe le gouverneur, la norme sera donc dépassée ». C’est dans ce contexte tendu qu’il va falloir négocier la nouvelle norme. Si le gouverneur n’a pas explicitement invité à la modération salariale, son appel à la « responsabilité collective » s’en rapproche furieusement…
L’inflation pose d’autant plus problème qu’elle est actuellement plus élevée en Belgique qu’ailleurs en zone euro (4,1 % contre 3,4 % prévus cette année). Pourquoi ? Parce que, selon la BNB, les augmentations de prix de trois groupes de produits ont pesé plus lourd chez nous : carburants et mazout (le Belge se chauffe plus au mazout que l’Européen moyen, selon la BNB), produits alimentaires transformés (le Belge mange plus de pain et de céréales), gaz et électricité (les tarifs de distribution ont décollé en Belgique cette année).
Au reste, l’inflation n’est pas le seul indicateur à s’être détérioré ces derniers mois. La crise financière mondiale, le blues de l’économie américaine et l’euro fort ajoutent leurs effets, freinant au final tous les moteurs économiques belges. Côté entreprises, les exportations et les investissements sont attendus en baisse. Côté ménages, la « progression limitée » du pouvoir d’achat moyen devrait freiner la consommation au moment où les investissements dans le logement se calment. Et l’emploi, dans tout ça ? « C’était la bonne nouvelle en 2006 et 2007, avec 53.000 et 73.000 emplois créés. » Cette année encore, 56.000 emplois devraient voir le jour mais il s’agit là d’un héritage : le niveau de l’emploi ne suit celui de l’activité économique qu’avec un décalage de deux à trois trimestres. Pour 2009, les prévisions de créations d’emplois retombent d’ailleurs à 30.000. Sur les finances publiques enfin, Guy Quaden ne peut que se répéter : « Sans mesures nouvelles du gouvernement, le déficit devrait se creuser à – 0,3 % du PIB en 2008 et à – 0,8 % en 2009. » La perspective du vieillissement invite pourtant à… dégager des marges.

07 avril 2008

Leterme Ier sans le sou

Marges budgétaires réduites, rentrées fiscales très insuffisantes, pouvoir d'achat attaqué, index en question. La rentrée sera placée sous le signe de l'économique pour le gouvernement Leterme Ier.
Son devoir institutionnel toujours intact (la fameuse « seconde phase » de la réforme de l'Etat), le gouvernement Leterme Ier, constitué à la veille de Pâques, effectue ce lundi sa rentrée tout imprégné d'une autre tâche : soutenir le pouvoir d'achat. Mission délicate pour un exécutif qui dispose de marges budgétaires extrafines (320 millions en tout, pour la hausse des pensions, des allocations familiales, le relèvement de la quotité exemptée d'impôt, la réduction de la facture énergie des ménages), qui plus est sous la menace de prévisions pessimistes en termes de taux de croissance économique : 1,6 % ou 1,7 %, au lieu du 1,9 % prévu. Différence : 250 à 500 millions d'euros. Circonstance aggravante, les recettes fiscales sont mauvaises, plus que d'habitude en début d'année : moins 2,64 % en janvier-février par rapport à 2007. Ajoutez le taux d'inflation. Le contrôle budgétaire de juin sera « problématique ».
Quadrature du cercle : composé de cinq partis, Leterme Ier est menacé de céder au saupoudrage de ses maigres deniers. Dans le Standaard de samedi, Bart Somers, président du VLD, résumait : « Si le gouvernement ne se prononce pas sur un projet, il sera un navire à la dérive. Notre accord de gouvernement est un catalogue Ikea où nous devons choisir quelle chambre à coucher, quel salon, quelle cuisine nous voulons. Il faudra trancher. »
Derrière, le souci pour le pouvoir d'achat grandit, générateur de tensions. En témoignent les échanges ce week-end autour de l'index après que Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque centrale européenne, eut critiqué le mécanisme en vigueur chez nous et au Luxembourg.
Elio Di Rupo (PS) a dénoncé la « vision ultralibérale » de l'économie. Didier Reynders (MR) a relativisé en rappelant que les produits pétroliers, le tabac et l'alcool n'entrent pas dans l'indice santé. Enfin, Guy Quaden, gouverneur de la Banque nationale, auquel on avait reproché son propos : « 2008 sera l'année de la vérité pour l'index », nous a précisé : « Je ne mets pas en cause notre index. M. Trichet parle de l'indexation générale des salaires, mais chez nous, le système a été réformé : on utilise l'indice santé, duquel on a retiré la plupart des produits pétroliers importés, sauf le mazout de chauffage. De plus, l'indexation est couplée à la norme de compétitivité, négociée tous les deux ans par les patrons et les syndicats. Notre système a bien contenu les prix et les coûts ces quinze dernières années. Voyons quels effets il aura en 2008 dans un contexte plus difficile. Mais je fais confiance aux partenaires sociaux, et je continue à défendre notre système. »