13 octobre 2007

El Che


Le mythe du « Ché » naît le 9 octobre 1967.




"Il était venu pour nous aider et il est tombé dans un piège". Manuel Cortez, un paysan bolivien de La Higuera, n'oubliera jamais sa rencontre avec le "Che", peu avant sa capture et son exécution dans l'école du village il y a quarante ans. Ce cultivateur de maïs de 63 ans est l'un des rares habitants encore en vie ayant croisé la route d'Ernesto "Che" Guevara, qui passa onze mois dans le maquis du sud-est bolivien pour allumer un foyer révolutionnaire en Amérique du sud."On ne connaissait pas bien les guérilleros à cette époque. On en avait peur. L'armée nous disait qu'ils venaient nous prendre nos terres", explique cet homme maigre aux sourcils broussailleux, dans un entretien avec l'Agence France Presse.

Le 26 septembre 1967, le "Che" fait irruption dans le village, présentant ses compagnons d'armes. "Les gens se sont enfuis quand ils sont arrivés. Il m'a dit : je suis le Comandante Che Guevara, nous ne venons pas là pour vous tuer, mais pour partager", raconte Manuel Cortez, qui se rappelle de son "regard pénétrant" et de ses crises d'asthme qui l'empêchait de parler. Rassurés, les villageois se rapprochent et partagent avec les guérilleros un petit festin autour d'un cochon à la braise. Le même jour, un combat fait trois morts parmi les rebelles mais le "Che" parvient à s'enfuir à dos de mule.Le 7 octobre, à la veille de la capture, le paysan se souvient de l'arrivée de 1.800 soldats dans le minuscule hameau de La Higuera, perché sur les hauteurs du maquis: "Ils savaient où le Che allait passer et avaient préparé une embuscade". Le lendemain, l'armée anéantit la guérilla, prise au piège dans la Quebrada (ravin) del Churo. Manuel Cortez revoit les militaires escortant le "Che": "Il était blessé à la jambe, avec le regard triste, les cheveux défaits".Cette nuit-là, les soldats boliviens "ont fait la fête et se sont saoulés à la bière". "Je me rappelle un qui disait à l'autre en riant: tu le tues ou c'est moi", poursuit le paysan. "Il était venu pour nous aider et il est tombé dans un piège". Manuel Cortez, un paysan bolivien de La Higuera, n'oubliera jamais sa rencontre avec le "Che", peu avant sa capture et son exécution dans l'école du village il y a quarante ans. Le 9 octobre, "plusieurs rafales de mitraillettes" retentissent à l'intérieur de l'école où était détenu le guérillero, troublant le silence du village: "J'ai compris qu'ils avaient tué le Che. J'ai couru et je l'ai vu, la poitrine en sang. Les soldats sautaient de joie, se donnaient l'accolade".Quarante ans plus tard, Manuel Cortez, qui vit seul dans la même masure en terre et en bois, assure que ces souvenirs sont "gravés pour toujours dans sa tête". "J'avais beaucoup d'affection pour le Che. En fait, il luttait pour les pauvres. Je n'oublierai jamais le Comandante".Le village, où trône un buste géant du guérillero, s'est depuis transformé en un petit mausolée à la mémoire du "Che", dont l'effigie orne la plupart des maisons. L'école a été transformée en musée et les slogans inondent les murs: "Ernesto, ton combat est le chemin de nos vies", "Tu vis pour toujours, Che Comandante".

Le Che tombait il y a 40 ans
Cuba commémore le quarantième anniversaire de la mort d'Ernesto Guevara, le plus célèbre des compagnons d'armes de Fidel Castro. Un hommage lui sera également rendu en Bolivie, où il a été capturé et exécuté, et en Argentine, où il est né.

Même si le mythe du Che a souvent été écorné par les historiens, l'ancien guérillero sud-américain fait encore fantasmer. Le Che est considéré comme le théoricien et le grand artisan de la révolution cubaine.

Fils d'aristocrate désargenté, Ernesto Guevara, dit le Che, est né en Argentine en 1928. Étudiant en médecine au début des années '50, il part à moto à la découverte du contient sud-américain. C'est en 1955 que son destin bascule. Il rencontre à Mexico Fidel et Raul Castro. A l'époque, les frères Castro sont exilés après l'assaut raté à Cuba contre la Moncada.

En 1956, Ernesto Guevara s'engage en compagnie des deux frères Castro pour le débarquement à Cuba. Ils lancent la guérilla qui les portera au pouvoir en deux ans. Le Che se révèle un chef de guerre impitoyable, exécutant lui-même les traitres et les espions.

Après la prise stratégique de la ville de Santa Clara, en 1958, contre les troupes de Fulgencio Batista, le Che ouvre les portes de La Havane. Fidel Castro entre triomphalement dans la capitale cubaine en janvier 1959.

Au début des années '60, le Che entend radicaliser la révolution. Il rencontre Khrouchtchev à Moscou et Mao Tsé Toung à Pékin. Il part ensuite propager la révolution en Afrique, notamment au Congo, mais aussi en Amérique latine.

Capturé en Bolivie le 7 octobre 1967, Che Guevara est exécuté le 9 octobre. C'est à Santa Clara que repose sa dépouille depuis 1997. Le visage du Che reste un symbole révolutionnaire. Mais, son image est écornée par les historiens. La figure romantique du Chef est ternie par celle du révolutionnaire froid et sanguinaire…

Ce jour-là, le héros de la révolution tombe sous les balles d'un soldat bolivien. Par cette mort, l'histoire d'Ernesto Guevara se transforme en légende. Une légende qui, depuis 40 ans, ne cesse de grandir.



Du jeune homme de bonne famille…Issu de la petite bourgeoisie argentine, Ernesto Guevara de la Serna naît le 14 juin 1928. Enfant, il souffre d'asthme suite à une pneumonie. Ce handicap le conditionne à rester enfermé et développe son goût pour la lecture : Apollinaire, Voltaire, Chateaubriand… emplissent sa bibliothèque. Début 1947, Ernesto entame des études de médecine. Mais, très vite, il délaisse les bancs de l'université. Il est âgé de 23 ans lorsqu'il s'embarque dans un voyage de 7 mois à travers l'Amérique latine, en selle sur la Vigoureuse, une vieille moto. Rencontrant des populations différentes, le jeune Argentin est confronté à la misère. Après ce voyage et celui qu'il fera en 1953, Ernesto, devenu entre temps médecin, se politise. Il adhère plus précisément aux idées révolutionnaires et marxistes.



…au révolutionnaireEn 1954, le jeune médecin rejoint les contrées mexicaines et s'y marie. C'est ici que son surnom « El Che » voit le jour, car en bon Argentin, il commence et termine toutes ses phrases par l'interjection « Che ». L'année suivante, Ernesto rallie la résistance mexicaine, opposée à la dictature américaine. C'est dans ce contexte qu'il rencontre Fidel Castro. Ensemble, les deux hommes fomentent une expédition pour libérer Cuba du tyran Batista. C'est ainsi que le 25 novembre 1956, Fidel et Ernesto, accompagnés de 80 hommes, débarquent à Cuba. La révolution est engagée et, en janvier 1959, le régime renversé. « El Che » obtient dès lors, les postes les plus importants du gouvernement. Mais, s'il s'impose comme le « penseur » du groupe, il devient aussi le plus violent partisan des exécutions des opposants. Souhaitant exporter la révolution et répandre les idéaux socialistes dans le monde, Ernesto quitte ses fonctions cubaines en octobre 1965. Après un détour par le Congo, le « Che » rejoint la Bolivie pour diriger la révolte des paysans et des mineurs contre le gouvernement militaire. Mais sa lutte reste sans issue et, le 9 octobre 1967, Ernesto Guevara meurt exécuté.
Une icôneA partir de cette date, « Che Guevara » incarne la liberté et l'anti-impérialisme. Déjà héros de son vivant, il devient un mythe ! Son nom est proclamé sur les barricades de mai 68. « Sous les pavés la plage, et sur la plage le Che, soleil de la Révolution » scandait une banderole !Et même la déroute du marxisme-léninisme n'a pas enterré l'image du « Che ». Son fascinant visage continue, quarante ans après sa mort, à fleurir t-shirts, drapeaux et autres badges, comme emblème de la rébellion et de l'insoumission. Récemment, des campagnes publicitaires, notamment celle de Liberty Surf, ont repris cette figure symbolique de la révolution instaurant ainsi une relation entre une marque capitaliste et le plus grand militant communiste de tous les temps… un comble !
Un cliché en or

L'image du « Che » au regard perçant, béret noir sur la tête, les cheveux dans le vent… Cette photo vous dit-elle quelque chose ?
Début mars 1960, un million de personnes se rassemblent à La Havane pour l'enterrement des victimes d'un attentat attribué à la CIA. Ce jour là, à la tribune, Fidel Castro fait un discours entouré par Jean-Paul Sartre, Simone De Beauvoir et Che Guevara. Alors à l'arrière de la tribune, le Che s'avance quelques moments pour embrasser la foule du regard. C'est à cet instant qu'Alberto Korda ajuste son objectif 90mm et prend une photo du révolutionnaire avant que ce dernier ne s'éclipse. A l'annonce de la mort de Guevara, sept ans plus tard, l'éditeur italien Giangiacomo Feltrinelli, proche du gouvernement cubain, utilise ce cliché pour une affiche. Cette reproduction du Che, le regard perdu et surmonté d'un béret à étoile, sera tirée à des millions d'exemplaires et deviendra un véritable symbole pour toutes les luttes dans le monde. L'anecdote raconte que Korda ne toucha jamais un centime de droit d'auteur pour cette photo qui aurait pu le rendre riche !

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