16 avril 2008

Un vent de contestation souffle au PS

Fait rare : le vice-président du PS, Philippe Moureaux, critique ouvertement la ligne du président Elio Di Rupo. L'affaire Laloux ravive de vieilles frustrations à l'intérieur du parti socialiste. Le président du PS se mure : pas de commentaire... .

De mémoire de camarades, on n'avait jamais vu cela... C'est la toute première fois que le vice-Président du PS, Philippe Moureaux, décoche des flèches empoisonnées à l'endroit de son président, Elio Di Rupo. Car sous couvert d'une critique à l'égard de Frédéric Laloux, l'ex-échevin de Namur bombardé secrétaire d'Etat à la Pauvreté par la grâce d'Elio Di Rupo, c'est bien le président du PS qui est la principale cible de Philippe Moureaux. En cause : le casting du gouvernement (principalement les secrétaires d'Etats Laloux et Fernandez) et par-delà, le laxisme à l'égard des "déviants". C'est au "Soir" que Moureaux a confié toute son amertume. Décodage.
1 D'où vient ce casting bizarre ? Elio Di Rupo a toujours adoré surprendre la galerie en proposant à la nomination des ministres et secrétaires d'Etat inattendus : Marie Arena, Christiane Vienne, Fadila Laanan, Marc Tarabella, Paul Magnette. Et tout dernièrement, Julie Fernandez Fernandez, échevine à Liège et, bien sûr, Frédéric Laloux, ex-membre du collège échevinal de Namur. Ces deux derniers étaient totalement inconnus au bataillon des "ministrables". C'est précisément pour cela qu'ils ont été choisis, explique-t-on au PS : Elio Di Rupo a voulu démontrer que le PS ne manque pas de talents.
2 Pourquoi Laloux ? Mais ces choix ne passent pas. Et au fil des jours, les choses, plutôt que de s'arranger, s'enveniment. Car si le PS ne manque pas talents, ces deux-là ne sont peut-être pas les mieux lotis. Et s'il fallait vraiment trouver un Namurois capable d'exercer cette fonction, Jean-Charles Luperto, Eliane Tillieux ou Valérie Deom étaient mieux placés. Mais Di Rupo n'a consulté personne à Namur. Bien sûr, Luperto a quelques ennuis depuis qu'au terme d'un collège euphorique, il s'est livré à une mauvaise blague téléphonique aux dépens du bourgmestre de Jemeppe. Mais bon. Entre cette stupidité de collégien et les problèmes de Laloux (surutilisation de sa carte essence) il y avait une hiérarchie des handicaps que le président du PS a niée.
3 Qui s'oppose à Di Rupo ? La liste des gens que le président a frustrés est longue au PS. Et petit à petit, les langues se délient. Anonymement bien sûr. Courageux, mais pas téméraires. N'est pas Moureaux qui veut. Aux commentaires, on devine que l'ère Di Rupo est doucement en train de s'achever. D'ailleurs, à intervalles réguliers, on sent bien que le principal intéressé n'est plus au top de sa forme et de son influence. Depuis 1999, date de son accession à la présidence du PS, il a accumulé les victoires. Sauf en 2007, évidemment, où la success story s'est brutalement achevée. Et Philippe Moureaux a raison de rappeler que l'échec est dû aux affaires plutôt... qu'à la loi sur les armes comme le prétendent les ennemis de la rénovation du PS, ceux qui vivent encore du souvenir des acquis du passé, rêvant des avantages politiques que leur procurait un PS à 44 pc.
Elio Di Rupo apparaît un peu blasé, comme si la popote interne de son parti ne l'amusait plus. Le syndrome "Louis Michel" en quelque sorte. D'ailleurs, il est bien plus aisé d'interroger Di Rupo sur la situation en Chine ou au Chili que sur ses équipes ministérielles. Certains disent qu'il rêve d'un job international. Mais ils ne sont pas légion.
4 Que cherche Philippe Moureaux ? Si, au PS, on pensait que l'ouragan né de la nomination de Frédéric Laloux était passé, Yves Leterme l'ayant accepté dans son équipe après l'avoir auditionné, la sortie de Philippe Moureaux relance le débat interne au PS.
Dès lors, les exégètes de la pensée de Moureaux tentent de comprendre. Pourquoi cette sortie publique, vivement contestée, dans sa forme, par Rudy Demotte, le Premier wallon ? D'abord, parce que, dûment informé du malaise interne, Elio Di Rupo aurait fait la sourde oreille. Plusieurs parlementaires (Mayeur, Eerdekens,...) avaient dit clairement leur dépit. D'autres se demandent si, au crépuscule de sa carrière politique, Philippe Moureaux, piqué au vif par un sondage reléguant le PS à la 3e position, derrière le MR et le CDH, ne cherche pas, en écorchant l'image d'Elio Di Rupo, à lancer l'idée d'un changement de président. Au profit de... sa protégée de toujours, Laurette Onkelinx. Evidemment, les Liégeois, en guerre interne permanente, ne verraient peut-être pas d'un bon oeil l'arrivée de cette Néobruxelloise. Un président bruxellois ? Pas sûr que les Wallons accepteraient cela.
5 Dans quel état est le PS ? Jusqu'ici, la rénovation n'avait pas trop mal progressé, malgré de retentissants ratés. Car dans beaucoup d'endroits, elle demeure superficielle. Et malgré l'optimisme affiché par le boulevard de l'Empereur, il demeure plus d'un hiatus entre le parti et sa base. Dès lors, de multiples zones de contestation apparaissent. Ne parlons pas de ceux qui, à l'approche des élections, espérant négocier une place en vue, ruent dans les brancards : les régionalistes qui menacent toujours de créer un parti dissident ou de rejoindre les rattachistes.
Si la lenteur d'Elio Di Rupo a condamner les agissements déviants est condamnée par Philippe Moureaux et ses amis, certains reprochent aussi au président de ne pas avoir eu le courage de profiter de l'échec électoral cuisant de juin 2007 pour se refaire une santé dans l'opposition, comme André Cools et Guy Spitaels en 1970 et 1980. " On est venu nous chercher" a coutume de dire Elio Di Rupo . "Il fallait refuser ", expliquent ceux qui étaient attirés par une vivifiante opposition.
6 Comment sortir de ce guêpier ? " Elio ne se déjugera pas , juge un baron. La meilleure chose qui puisse arriver, c'est que Laloux se retire. Mais je ne suis pas sûr qu'il en ait les c... "

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