25 avril 2008

De Gucht n'a pas dérapé

Le discours musclé de Karel De Gucht reflète bien la position du gouvernement. Tout avait été concerté la semaine dernière. Plusieurs députés suggèrent à Yves Leterme d'aller sur place, au Congo, pour rencontrer Joseph Kabila.
Cinq questions dont trois émanant des bancs de la majorité, jeudi après-midi en séance plénière de la Chambre. C'est clair que la politique congolaise de la Belgique pose question. C'est Yves Leterme lui-même qui a répondu aux questions.
Vlaams Belang excepté, toutes les interventions sont allées dans le même sens, fût-ce avec quelques nuances : n'est-on pas en train d'envenimer inutilement nos relations avec la République démocratique du Congo, alors que les Congolais ont besoin de nous ?
Diplomatie ou bâton
Le débat aura finalement plus porté sur l'évaluation des progrès engrangés (bouteille vide ou à moitié pleine ?) que sur cette question essentielle : quelle est la manière la plus efficace de faire passer le message ? La diplomatie discrète ou le bâton ?
Mais l'autre question que tout le monde se posait est venue de la bouche de Christian Brotcorne (CDH) : les propos de Karel De Gucht reflètent-ils ce qui avait été confié au ministre des Affaires étrangères dans le cadre de cette mission ? Et la réponse du Premier ministre a été sans ambiguïté : c'est oui. "Le message des trois ministres reflète la position de l'ensemble du gouvernement". Il a été "fixé la semaine dernière en concertation" et "on a amplement parlé" alors de la teneur du discours de Karel De Gucht.
Colonialisme
Le chef de groupe CDH a aussi suggéré au Premier ministre "d'envisager un voyage sur place pour peut-être éteindre ce qui ne devrait pas devenir une stérile polémique".
Même invitation de la part de Juliette Boulet (Ecolo) mais saupoudrée de propos plus durs : "Vous devriez aller sur place pour vous rendre compte de ce que les Congolais attendent réellement", suggère la députée. La représentante des Verts a qualifié de "colonialistes et paternalistes" les propos du chef de la diplomatie belge. Elle a évoqué deux poids et deux mesures par rapport à l'indulgence dont la Belgique fait preuve à ses yeux à l'égard de la Chine ("Là, on tarde, on s'en remet à l'Europe, par crainte de sanctions économiques"). Elle s'est enfin plainte de ce que l'on parle au nom des Belges, alors même que la note politique de Karel De Gucht n'a pas encore été distribuée et n'a donc pas pu faire l'objet d'un débat au Parlement.
André Flahaut (PS) a d'abord enfourché son dada, la politique de Défense, pour constater, on résume, que c'est la continuité qui prévaut. Mais lui aussi a poussé Yves Leterme à prendre contact avec le Président de la RDC pour lui repréciser les termes des accords conclus, et enfin "revenir au calme et à des relations normales". Pour lui, "un partenariat, ce n'est pas seulement des chiffres, c'est une relation de confiance entre des responsables, et cette confiance se gagne dans la durée".
Il a estimé que cette relation doit aussi évoluer dans le temps en tenant compte des circonstances nouvelles : "La Belgique est encore acceptée autour de la table mais elle n'est plus le partenaire exclusif ni même privilégié, qui peut se permettre d'expliquer ce qu'il faut faire en levant le gros doigt". En résumé, il s'est inquiété "de l'attaque frontale et peu diplomatique contre les autorités politiques du Congo", Congo qui, a-t-il rappelé, est un Etat souverain.
Leterme au Congo ?
Yves Leterme ira-t-il au Congo ? Il n'a pas répondu jeudi à cette question. Mais sur le fond du problème, il est resté sévère. "La façon dont les choses se déroulent là-bas est préoccupante, en matière de bonne administration, de l'organisation d'un Etat de droit et de lutte contre la corruption. Il y a trop peu d'avancées. Sans cela, ce pays ne se relèvera jamais." Il a encore évoqué la situation dans l'Est, "qui est loin d'être normalisée" et rejeté l'accusation de néocolonialisme. Pour lui, "la RDC est un Etat souverain avec lequel la Belgique entretient une relation, particulière et ancienne, de partenariat". Enfin, il a tenu à minimiser la portée des propos tenus, M. Kabila ayant, selon lui, "estimé lui-même qu'il n'y avait pas eu d'incident", une lecture du climat ambiant qui ne sera vraisemblablement pas partagée par tout le monde.

Le Congo, parent pauvre de l'aide occidentale
Les aides occidentales promises n'arrivent pas ou arrivent très tard. Du coup, Kinshasa va chercher la coopération là où il la trouve et l'effort de reconstruction en est à ses balbutiements.

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