23 novembre 2006

Nouveau dossier explosif à Charleroi

La Justice soupçonne d'ingénieux détournements de fonds mis en place à l'époque
où Van Cau était bourgmestre.
Le dossier "Econoler" de la juge Baekeland est considéré comme majeur. Les patrons de l'entreprise nient toute fraude.

Econoler s'estime victime

La société Econoler, au centre d'un dossier judiciaire à Charleroi révélé par Le Soir, estime que sa mise en cause dans la presse nuit gravement à son image et étudie les recours envisageables.
Des responsables d'Econoler ont été entendus récemment par la justice carolorégienne à propos de son système de tiers investisseur et des contrats passés depuis 20 ans avec la Ville de Charleroi, selon Le Soir (voir l'article lié). La justice disposerait d'indices selon lesquels les remboursements auraient été effectués de manière irrégulière. Econoler n'aurait pas fourni de prestations mais bien reçu les versements correspondant aux remboursements dus pour les investissements initiaux.
Dans un communiqué, Econoler se présente en victime dans cette affaire. Elle a chargé Me Jean-Philippe Mayence de défendre ses intérêts et étudie les recours envisageables, estimant que son image a été gravement mise en cause auprès de ses clients. "Ces derniers jours, Econoler a fait procéder à une vérification complète de ses comptes; aucun élément n'accréditant la thèse du Soir n'a été relevé", affirme la société canadienne dans un communiqué.

La Ville de Charleroi s'est toujours acquittée vis-à-vis d'Econoler du paiement de ses dettes, dans le respect des accords contractuels, affirme la société.
Econoler dit aussi agir en toute transparence: "le système du tiers investisseur, basé sur le livre ouvert complet envers la Ville de Charleroi, permet à toute personne de la Ville de savoir à tout moment quelle est la situation financière des projets, que ce soit dans la phase de réalisation ou de remboursement. Toute l'information est donc disponible à tout moment pour tout le monde", affirme Econoler, qui ajoute que ses comptes sont vérifiés et certifiés chaque année par une société d'audit internationale.


Pas de répit pour la Justice carolo. Cette fois, le dossier porte le doux nom de code d'« Econoler ». Des documents comptables saisis lors de récentes perquisitions auraient mis la puce à l'oreille des enquêteurs. Qualifiée d'« explosive », l'affaire masquerait un ingénieux mécanisme de détournements de fonds touchant directement les caisses de la Ville.

Tout commence dans les années 80. Jean-Claude Van Cauwenberghe est encore bourgmestre. La Ville signe un contrat avec Econoler, une société canadienne spécialisée dans les économies d'énergie. Son business : financer les investissements nécessaires pour réduire la facture énergétique (double vitrage, chaudière...) et se rembourser en encaissant les économies réalisées. Jusque-là, rien d'illégal. Sauf que, selon les indices en possession de la Justice, les remboursements auraient été effectués de manière irrégulière. L'argent dû aurait suivi des voies détournées. A-t-il garni quelques poches privées ? C'est tout le sens de l'enquête en cours.

Entendus, les dirigeants d'Econoler nient farouchement. Van Cau, lui, renvoie la patate chaude à l'ex-échevin Despiegeleer, qui aurait pris cela en charge.
De son côté, la juge Baekeland décèle, grâce à ce dossier, la possibilité d'interroger pour la première fois l'ex-bourgmestre de Charleroi. Et de faire le lien entre les affaires de marchés truqués qui ont secoué la Ville.

Econoler, mode d'emploi

E n pratique, comment fonctionne le concept Econoler ? « Lorsqu'une ville veut faire appel à une société de tiers investisseur, elle doit passer par un appel d'offres. Nous venons d'en gagner un à Seraing et un à Gembloux, explique l'administrateur délégué d'Econoler, Christophe Gilain. Je ne sais pas si, à l'époque en 86-87, la Ville de Charleroi a dû passer par là : je n'y étais pas. » Malgré plusieurs demandes de notre part, les archives d'Econoler n'ont pas permis d'en retrouver trace.
« Concrètement, nous rendons une pré-étude à risques à la Ville, poursuit l'administrateur, en lui expliquant qu'en investissant, par exemple, 100 euros, elle en fera 15 en économies d'énergie par an. Si le collège accepte notre proposition, nous commençons une étude. Ensuite, nous nous représentons avec des données chiffrées très précises en termes d'investissements et d'économies devant le collège. S'il approuve le programme, le travail commence. »

Ce travail, c'est aussi par un appel d'offres qu'il débute. « Nous exposons nos besoins à des sociétés. Que nous connaissons ou que la Ville connaît. Nous présentons un comparatif de leurs offres au collège qui choisit la société qui exécutera les travaux », poursuit Christophe Gilain.Vient alors la phase d'exécution. « Nous passons commande du matériel nécessaire aux travaux. Nous en surveillons la réalisation, que nous finançons intégralement. En outre, nous donnons au client la garantie d'un budget qui ne sera pas dépassé. Et, dans le cas de la Ville de Charleroi, nous avons assuré que, s'ils n'avaient pas récupéré leur investissement dans les sept ans, ils ne devaient plus rien nous rembourser. »
Ce remboursement, Econoler le récupère sur les économies d'énergie. « Chaque mois, nous surveillons la consommation énergétique de nos clients ; ils nous paient en fonction de leurs économies. Chaque mois, le solde qu'ils nous doivent diminue. Si le projet se rembourse plus vite que le plan préétabli, le contrat se termine. »

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