30 septembre 2007

Le peuple birman gronde


L'envoyé de l'ONU rencontre Aung San Suu Kyi
L'émissaire spécial de l'ONU, Ibrahim Gambari, a rencontré dimanche à Rangoon l'opposante birmane Aung San Suu Kyi. Ils se sont entretenus pendant environ une heure quart dans un bâtiment gouvernemental.

30 sep 2007 14:00
La rencontre d'Ibrahim Gambari avec Aug San Suu Kyi est au moins un signal positif même si elle n'est peut-être qu'un signe purement symbolique. Ibrahim Gambari était déjà le dernier visiteur à avoir rencontré l'année dernière la prix Nobel de la paix qui a passé l'essentiel des 18 dernières années en prison ou assignée à résidence chez elle sans aucun contact avec l'extérieur.

Auparavant, Ibrahim Gambari s'était rendu à Naypyidaw, la ville nouvelle créée de toutes pièces où la junte a transporté son administration en 2005. Il semble qu'il y ait rencontré le numéro un du régime, le généralissime Than Shwe. Mais rien n'a encore filtré sur la tenue de leur entretien.

Pendant ce temps, les rues de Rangoon sont calmes. Les habitants n'osent plus s'y aventurer. C'est le calme par la terreur. Mais jusqu'à présent, la junte semble résister aux pressions internationales. Même la Chine a demandé aux autorités birmanes d'adopter des méthodes pacifiques.

Et puis le Japon envoie un émissaire en Birmanie, à la fois pour obtenir une enquête sur les circonstances de la mort du photographe japonais tué pendant les manifestations et pour réclamer que la junte opte pour le dialogue plutôt que pour la force.

La junte a aussi autorisé une reprise partielle du transport de l'aide alimentaire au départ de Mandalay, au nord du pays. Samedi, le programme alimentaire mondial de l'Onu avait signalé que 500 tonnes de vivres y étaient bloquées. Ce dimanche, trois convois ont pu prendre la route. D'autres restrictions pourraient être levées lundi.

L'opposante birmane Aung San Suu Kyi serait en prison

Le Premier ministre du gouvernement birman en exil Sein Win a affirmé mercredi à Paris que l'opposante et Prix Nobel de la Paix Aung San Suu Kyi, placée en résidence surveillée depuis 2003 par la junte, avait été transférée dimanche en prison.Interrogé à Paris sur des rumeurs faisant étant de l'emprisonnement d'Aung San Suu Kyi, Sein Win a déclaré: "nous avons cette information de deux sources". "Jusqu'ici, ce n'était pas certain car nous n'avions qu'une source, mais maintenant nous l'avons eue d'une autre source indépendante", a ajouté Sein Win, qui est un cousin de l'opposante. "Elle est à la prison d'Insein depuis dimanche après le passage des moines devant sa maison", a-t-il affirmé.Un diplomate occidental à Rangoun joint par téléphone a toutefois indiqué ne pas avoir "confirmation" d'un tel transfert. "Nous avons plutôt eu un démenti", a-t-il dit, ajoutant que "tout porte à croire" que la lauréate du Prix Nobel de la Paix est encore dans sa résidence.Sein Win devait être reçu mercredi en fin d'après-midi par le président français Nicolas Sarkozy, alors que la répression par la junte birmane de manifestations pacifiques a fait mercredi quatre morts, dont trois moines bouddhistes, et cent blessés.Mardi, une source policière birmane avait démenti qu'Aung San Suu Kyi ait été transférée en prison. Sein Win a été désigné Premier ministre du gouvernement de coalition nationale de l'Union birmane en exil après la victoire en 1990 de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) dirigée par Aung San Suu Kyi. (belga)

La contestation s’amplifie contre la junte militaire au pouvoir
La longue marche des bonzes

L’« ARMÉE ROUGE » des moines s’est levée contre le régime. Des citoyens rallient le mouvement. Toujours plus nombreux.


Les pluies de la mousson humide, qui s’abattent sans discontinuer depuis plusieurs jours sur Rangoon, ne les effraient pas. Marchant dans les rues inondées, le regard déterminé, certains brandissant des drapeaux, les bonzes de Birmanie, qui manifestent quotidiennement contre le régime militaire depuis mardi dernier, donnent l’impression d’être parfaitement organisés. Parfois, en tête de cortège, un des moines bouddhistes porte un bol à aumônes renversé. C’est le symbole du boycottage. Les bonzes refusent les offrandes des militaires et de leurs familles, tant que les hauts dirigeants ne se seront pas excusés pour les violences commises contre certains des leurs début septembre.
La première manifestation, le 18 septembre, avait rassemblé 400 de ces religieux revêtus de leur robe rouge. Dimanche, ils étaient 10.000 à traverser Rangoon, accompagnés d’un nombre égal de laïques venus les encourager. Du jamais vu depuis les grandes manifestations antimilitaires de 1988, lesquelles avaient renversé le régime du dictateur Ne Win. Un coup d’Etat, le 18 septembre de cette année, accompagné d’une féroce répression (3.000 morts), avait réinstallé une junte à la tête du pays.
Les manifestations contre le régime avaient été lancées à la mi-août par un groupe d’anciens étudiants impliqués dans la révolte de 1988 : ils dénonçaient la hausse brutale du prix du carburant, qui a rendu les transports collectifs inaccessibles pour une grande majorité des Birmans. L’arrestation de 150 de ces leaders avait stoppé net le mouvement après quelques jours. C’est alors que la vague rouge s’est levée : l’armée des bonzes – 500.000 dans le pays – s’est mise en marche, à la surprise de la junte au pouvoir. « Les généraux n’avaient pas prévu l’implication des bonzes. Avec le mécontentement qui s’étend dans la sangha (la communauté monastique), cela devient très risqué pour le régime. Les militaires savent bien que les gens écoutent les moines », explique le directeur d’une ONG à Rangoon.
Car les bonzes sont au cœur de la vie sociale. Pour les Birmans, ils ne sont pas seulement des religieux, mais aussi des conseillers qui les aident dans leurs tracas quotidiens. Faisant tous les matins leur tournée pour recueillir les offrandes des fidèles, les moines sont conscients des difficultés économiques des Birmans. « Les bonzes dépendent des offrandes de la population. Si la population est affectée, ils en subissent le contrecoup. C’est pour cela que les jeunes bonzes sont très impatients et en colère », explique un journaliste birman.
L’activisme politique de la communauté monastique n’est pas nouveau. En 1988, les moines avaient gonflé de leur nombre les cortèges qui avaient pris possession des rues de Rangoon. Conscients du pouvoir immense des religieux sur le peuple, les généraux avaient réagi en imposant un contrôle strict de la sangha par l’administration. Le régime avait aussi abreuvé de cadeaux et d’argent les abbés des pagodes les plus influentes. Ce n’est donc pas toute la communauté monastique qui descend dans la rue depuis le début septembre, mais les jeunes bonzes en formation.
Désormais, les bonzes appellent les laïques à se joindre aux défilés, donnant l’impression qu’ils veulent forcer la main de la junte pour un changement de nature du régime. Samedi, la dirigeante de l’opposition assignée à résidence, Aung San Suu Kyi, est sortie de chez elle pour la première fois depuis quatre ans pour saluer respectueusement, les larmes aux yeux, les bonzes qui défilaient devant chez elle. Cette brève rencontre symbolise la jonction entre deux forces puissantes qui irriguent la société birmane, la communauté monastique et le mouvement prodémocratique.
Sur quoi peut déboucher cette révolte ? Certains brandissent le spectre du massacre de 1988, quand l’armée avait tiré dans la foule, y compris sur les moines, après avoir laissé les manifestations se développer pendant plusieurs semaines. « Tôt ou tard, il y a aura une répression. Les généraux ne feront jamais de compromis », affirme le journaliste birman Aung Zaw. Le contexte international est toutefois différent. Même la Chine, alliée fidèle de la Birmanie, a manifesté son impatience devant l’attitude bornée des généraux. Faire usage de violence risquerait d’éroder les quelques soutiens extérieurs dont la Birmanie dispose encore.

MAJ 25 septembre 2007

La junte militaire birmane a lancé lundi une mise en garde aux moines bouddhistes, qui venaient de conduire un défilé de 100.000 personnes hostiles au régime dans les rues de Rangoon. C'est la manifestation la plus importante depuis le soulèvement pro démocratie avorté de 1988.


La junte militaire birmane a lancé lundi une mise en garde aux moines bouddhistes, qui venaient de conduire un défilé de 100.000 personnes hostiles au régime dans les rues de Rangoon. Il s'agissait de la plus grande manifestation qu'ait connue la première ville birmane depuis le soulèvement pro-démocratie avorté de 1988.
Les autorités ne sont pas intervenues pour disperser le cortège, mais le ministre birman des Affaires religieuses, le général Thura Myint Maung a laissé entendre lundi que le gouvernement pourrait intervenir contre les moines protestataires si leurs supérieurs ne le font pas.

La télévision officielle a montré des images du général rencontrant des membres du clergé bouddhistes à la pagode Kaba Aye de Rangoon. Lors de cette réunion, il a expliqué que les bonzes qui manifestent ne représentaient que 2 % de la population. Il les a accusé d'être utilisés pour provoquer des troubles par la Ligne nationale pour la démocratie (LND), le parti de la dissidente Aung San Suu Kyi, maintenue en résidence surveillée par la junte, le groupe d'étudiants de la Génération 88 et des agitateurs occidentaux, dont des médias étrangers.
Au septième jour consécutif de manifestations anti-gouvernementales conduites par les bonzes, le cortège, emmené par 20.000 moines, était parti lundi de la Pagode Shwedagon, temple le plus sacré du pays, et avait vu grossir ses rangs lors de son passage dans les rues de Rangoon.
Du côté des manifestants, certains avançaient le chiffre de plusieurs centaines de milliers de participants, mais les employés d'une organisation humanitaire internationale ayant observé le défilé ont estimé leur nombre à près de 100.000.
A l'issue de cinq heures de marche et au moins 20 kilomètres parcourus, les derniers manifestants -un millier de moines et 400 sympathisants- se sont dispersés à un carrefour où des policiers bloquaient l'accès vers le domicile d'Aung San Suu Kyi, figure de proue de l'opposition, toujours assignée à résidence par la junte.
Chants et prières
Par ailleurs, à Mandalay, dans le centre du pays, un millier de moines ont également organisé une marche de protestation. Comme à Rangoon, les autorités n'ont pas tenté de l'empêcher.
Après une semaine de marches, les manifestations sont devenues explicitement politiques, même si les moines, fers de lance du mouvement, préfèrent s'exprimer indirectement par des chants et des prières. De nombreuses personnes les ont rejoints et ont repris les slogans du mouvement pro-démocratie : la réconciliation nationale, la liberté pour les prisonniers politiques et des appels à de meilleures conditions de vie.
Un cran a été franchi samedi lorsque plus de 500 personnes ont franchi les barrages pour se rendre à la résidence d'Aung San Suu Kyi, où elle a fait à cette occasion sa première apparition publique depuis plus de quatre ans. Dimanche, 20.000 personnes ont manifesté dans les rues de Rangoon, mais la police a cette fois empêché les bonzes d'approcher de la maison de la dissidente.
Le mouvement de protestation a commencé le 19 août pour dénoncer la vie chère après une forte hausse des prix du carburant, mais il puise ses racines dans un mécontentement ancien à l'égard du régime militaire au pouvoir.
Jusqu'ici, la junte, qui avait écrasé dans le sang le soulèvement pro-démocratie de 1988, a fait preuve de retenue sous la pression de la Chine, son principal partenaire commercial et allié, soulignent les experts. « Pékin organise les Jeux olympiques l'été prochain », souligne un diplomate du Sud-Est asiatique ayant requis l'anonymat. La Chine est le principal soutien de la junte, et si Rangoon prend des mesures répressives « cela risque d'affecter l'image de la Chine », ajoute-t-il.
La Chine, qui lorgne sur les vastes réserves pétrolières et gazières de la Birmanie, s'est opposée cette année à ce que le Conseil de sécurité de l'ONU critique la situation des droits de l'Homme en Birmanie. Mais dans le même temps, Pékin a recours à une diplomatie discrète et à de subtiles pressions, exhortant Rangoon à s'engager sur la voie de la démocratie et à accélérer le processus de dialogue et de réformes.
(D'après AP)

1 commentaire:

Anonyme a dit…

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