Le ring de Bruxelles va encore s'élargir
Un tunnel de bitume sous la forêtSOUMOIS,FREDERIC
vendredi 13 juillet 2007, 06:49
R efermer la boucle du ring zéro autour de Bruxelles par le sud, en reliant le « virage de Forest » à l'est de Bruxelles... L'idée ne date pas d'hier. Mais difficile de bétonner impunément une partie d'Uccle, le bois de la Cambre et une partie de la forêt de Soignes. La solution ? L'enterrer, afin de minimiser les conséquences sur l'environnement et les habitants. Il s'agit de créer un tunnel de dix kilomètres de long entre Forest et la fin de l'autoroute de Namur, où les voitures déboucheraient sur un mini-échangeur leur permettant d'aller vers Namur, de rejoindre le ring vers Zaventem ou d'entrer dans Bruxelles. Il permettrait les passages est-ouest par le sud, alors qu'aujourd'hui, le trafic passe au nord, rechignant à effectuer le détour par Ittre, qui représente un supplément de trente kilomètres. Il permettrait aussi de délester le tronçon à deux bandes du ring est, qui passe par Waterloo.
Son tracé est imaginé près de la gare de Calevoet, au sud de l'observatoire, sous le bois de la Cambre, le long de la chaussée de La Hulpe, avant de plonger sous le boulevard du Souverain, puis de déboucher près du Centre sportif de la forêt de Soignes (voir infographie). La section de ce tunnel serait de 13,85 mètres, comportant trois bandes, dont une réservée aux transports en commun. Les véhicules ne se croiseraient pas, puisque chaque sens de circulation aurait son niveau. Plusieurs stations intermédiaires, appelées « échangeur multimodal », permettraient de rejoindre une gare ferroviaire ou une station de métro. On pourrait y adjoindre des parkings souterrains. Voire des immeubles pour payer une partie du chantier. Mais devant la tiédeur des réactions des communes et de la Région bruxelloises, d'autres itinéraires ont été étudiés, dont l'un suit une voie de chemin de fer et une autre resurgit au-delà du carrefour des Quatre-Bras. Ce qui évite habilement de surgir à la surface en région bruxelloise.
Au Nord, la Flandre entame les travaux d'un ring à dix voies. Au Sud, un projet de tunnel. Les premières expropriations sont en cours pour agrandir la voie. Et si on construisait plus loin ?
U ne cargaison de jambons qui joue à saute-mouton sur le bitume un matin, à l'heure où pointe la rosée. Ou un camion-citerne qui s'encastre dans un pilastre. Il n'y a plus une seule semaine sans que des files interminables ne plombent la circulation du ring de Bruxelles. Un ruban de bitume autour de la capitale qui n'est pas né d'un vrai plan directeur, mais de la juxtaposition, plus ou moins harmonieuse, de jonctions entre les différentes autoroutes qui, dans toutes les directions, atteignent Bruxelles. Ce qui explique que ce ring, baptisé « ring zéro » (R0), comporte aujourd'hui de quatre à dix bandes selon les endroits.
Une affaire de Bruxellois ? Pas vraiment. Car les files remontent parfois jusqu'à Louvain, Wavre ou Ittre, ankylosent le coeur du système de circulation du pays, font frissonner les industriels et les investisseurs, notamment ceux qui opèrent autour du port d'Anvers. « Le pays perd chaque jour 46 euros par véhicule dans chaque embouteillage », explique Chris Caestecker, directeur général des voies et circulation de la Région flamande.
« À Anvers, nous construisons un pont, des tunnels, nous complétons le ring. Par ailleurs, il faut certes développer des alternatives de déplacement et investir dans le rail et la voie d'eau. Mais il faut aussi que la misère cesse sur le ring de Bruxelles. » Le problème est complexe, car il concerne une zone de 3 millions d'habitants, plus grande que la Région bruxelloise. Cette zone est nommée « zone RER » en référence au réseau ferré express régional que l'on y construit. « Mais cette zone voit 1,5 million de déplacements entre 6 et 10 heures. Le RER va permettre de transporter 35.000 personnes en plus. Il ne suffira pas seul à réduire les embouteillages », explique Thierry Duquenne, directeur de la stratégie à l'administration bruxelloise de l'Equipement.
D'après les projections, d'ici à 2016, date de mise en service du RER, le trafic sur le ring devrait augmenter de 10 %, alors que la plupart des tronçons sont déjà saturés à plus de 80 % en heure de pointe. Sauf à imaginer un changement structurel de société, la route semble incontournable dans un futur proche. Des solutions sont sur la table. Certaines sont en cours de réalisation, d'autres au stade d'études théoriques d'ingénieurs. Revue de détail.
1. Le plan Start va dédoubler le ring au Nord. Le projet est en route. Il s'agit de doubler le ring nord actuel, entre les autoroutes d'Ostende et de Liège (voir ci-contre). Deux bandes supplémentaires dans chaque sens vont être construites afin d'absorber le trafic « local », tandis que les deux fois trois voies (et parfois quatre ou cinq) du ring actuel n'auront plus accès aux sorties intermédiaires. Ce projet comprend de nombreuses expropriations, notamment dans la zone de Zaventem. « Elles commenceront dans quelques semaines. La construction proprement dite commencera en 2009 et la mise en service sera complète deux ou trois ans plus tard », explique Raf Van den Broeck, directeur au département des travaux publics de la Région flamande.
C'est un volet peu connu du plan Start, un plan de redéploiement économique de la zone de l'aéroport de Zaventem, mis en oeuvre après l'annonce du départ de DHL de Bruxelles. Il comprend aussi la mise sur pied de treize lignes radiales de bus rapides et un diabolo ferroviaire autour de l'aéroport. Deux soucis : l'impossibilité d'augmenter aisément la capacité du viaduc de Vilvorde... sans en construire un autre. Et le fait qu'au-delà de l'autoroute de Louvain-Liège, rien n'est prévu. Dix bandes de
circulation vont donc devoir entrer dans six bandes jusqu'aux Quatre-Bras, et même dans quatre seulement au-delà. L'entonnoir majuscule. La Région flamande ne prévoit-elle rien pour ce tronçon ? « Pas impossible, mais ce n'est pas notre priorité actuelle », répond-on au ministère des travaux publics.
2. Un tunnel pour boucler le ring au Sud. La construction de la boucle sud du ring ayant été écartée dans les années 70 pour des raisons de préservation de l'environnement et du cadre de vie, la Road Federation Belgium, le lobby de la route, a imaginé de faire passer le trafic... sous la forêt. Le tunnel, d'une dizaine de kilomètres, relierait Forest à Auderghem (voir ci-contre). Il serait à deux niveaux, un dans chaque sens. Les camions y seraient proscrits, même si le gabarit de 3 m 30 permet d'y faire circuler les bus. Face à l'inquiétude des communes riveraines de voir surgir du sol des milliers de voitures au coeur de leurs rues, il est prévu de restreindre l'accès des échangeurs multimodaux aux riverains et à de petites camionnettes qui desserviraient les commerces. Le coût, évalué à un milliard, serait couvert... par un péage, entre 1 et 3 euros. Face au peu d'enthousiasme de la Région bruxelloise face au projet, d'autres variantes ont été imaginées, comme celle qui part de Ruisbroeck et qui pourrait longer le chemin de fer. L'arrivée pourrait aussi être plus lointaine, après le tunnel des Quatre-Bras, ce qui permettrait d'éviter cet étranglement... et la région bruxelloise, qui serait seulement affectée dans son sous-sol. Car la Province du Brabant flamand s'est montrée beaucoup plus intéressée que la capitale par le projet.
3. Un péage pour déboucher le ring. Même si elles le démentent parfois, les autorités bruxelloises étudient l'instauration de péages à l'entrée de la capitale. Avec un portique à chacun des 40 principaux points d'accès à la ville, on peut espérer faire diminuer la pression automobile de 20 %. Aujourd'hui, 200.000 véhicules entrent et sortent de la capitale chaque jour.
4. Un hyper-ring au Nord, projet dit de la « Croix de Willebrouck ». Et si on étendait le ring... plus loin ? Le projet, qui date de 2002, consiste à doubler le ring actuel par un réseau continu de routes de deux fois deux bandes qui commencent à Hal, au sud de Bruxelles, pour atteindre Nivelles. Puis pour filer à l'est par la RN25 jusqu'à Grez-Doiceau. Le projet implique de compléter la 25 vers Louvain, puis de hausser le gabarit de la RN26 vers Malines, avant d'arriver vers la fameuse Croix de Willebrouck, au sud d'Anvers. Ce réseau élargi filerait ensuite vers Termonde, Alost et Ninove... pour aboutir à Hal. Et la boucle est bouclée. Elle permettrait au trafic international vers le Sud et l'Est d'éviter le ring zéro de Bruxelles. Le coût ? Sans doute pharamineux, même s'il se base sur la hausse de gabarit de routes existantes. Il s'oppose aussi à l'esprit de l'actuel aménagement des nationales. Ces dernières années, de nombreuses routes ont été réaménagées pour supprimer la bande centrale afin d'y ménager des abris pour piétons qui traversent et des pistes cyclables. « Sans doute sera-t-il nécessaire de contourner l'une ou l'autre agglomération », indique Yves Decoene, secrétaire général de la Road Federation Belgium.
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